
Chercheur visiteur
Promoteur : Thomas DROUET
Sujet de thèse
Evaluation et analyse de risque de l’exposition des cultures urbaines et des sols aux éléments-traces métalliques en Région de Bruxelles-Capitale
Dans un contexte d’expansion de l’agriculture urbaine, la Région de Bruxelles-Capitale (RBC) développe des stratégies baptisées « Good Soil » et « Good Food » visant respectivement à améliorer la qualité des sols et à rendre le système bruxellois de production de nourriture plus résilient. En effet, de nos jours, la production urbaine de fruits et légumes est en forte augmentation, favorisant la résilience alimentaire des ménages mais ayant aussi des impacts positifs sur le bien-être de la population et la biodiversité urbaine. Cependant, les cultures fruitières et le maraîchage en ville sont exposés à des polluants d’origine anthropique, notamment les éléments-traces métalliques (ETM).
Les ETM sont des composants chimiques présents à des concentrations généralement faibles dans les sols naturels, tels que le cadmium (Cd), le plomb (Pb), le zinc (Zn), le nickel (Ni) et le cuivre (Cu). Certains sont essentiels à des processus biologiques, mais d’autres peuvent être toxiques à faible dose. Ces métaux sont considérés comme nocifs car ils ne peuvent pas être décomposés, ce qui peut entraîner leur accumulation et ainsi des concentrations toxiques pour les êtres vivants. L’exposition au Cd peut entraîner des dysfonctionnements du rein et du foie mais aussi des dommages au squelette tandis que le Pb peut engendrer une perte des capacités cognitives et accroître les temps de réaction et les comportements d’hyperactivité ou de troubles de l’attention, surtout chez les jeunes enfants, voire des troubles vasculaires, rénaux et de la reproduction. La contamination des cultures par des ETM demeure donc une préoccupation légitime en raison des risques potentiellement graves pour la santé humaine liés à l’ingestion de cultures et/ou de particules de sol contaminé.
L’entièreté du pool d’un ETM présent dans le sol est désignée sous le terme de “fraction totale”. La majeure partie est intégrée dans des réseaux cristallins et n’est pas disponible pour les plantes. En Belgique, la teneur maximale en ETM dans les sols est définie par sa fraction totale. Les formes ioniques peuvent s’adsorber à la surface de colloïdes du sol (argiles, matière organique, oxyhydroxydes) et sont assimilables : on parle alors de fraction biodisponible ou échangeable.
La contamination des cultures en éléments traces métalliques (ETM) peut provenir de différentes sources environnementales telles que les activités industrielles passées et présentes ou la circulation routière. Les sols urbains peuvent être contaminés par des déchets industriels de construction et de remblais contaminés en ETM. La végétation et les sols des bords de routes peuvent être affectés par les retombées atmosphériques d’ETM notamment à cause des particules émises par les moteurs à combustion ainsi que l’usure des pneus et des pièces mécaniques.
Les industries (métallurgie, fonderie, mine) peuvent également relarguer des ETM dans l’atmosphère, qui se déposent ensuite à la surface des sols et peuvent être mélangés au substrat. De fait, plus la distance par rapport à la source d’émission est grande, moins la concentration en ETM est élevée. La présence de barrières entre la source d’émission et les cultures peut réduire la concentration en ETM dans les cultures en entravant la dispersion des particules atmosphériques. Les conditions météorologiques peuvent également influencer la concentration en ETM dans les cultures.
La biodisponibilité d’un ETM dans le sol dépend de la mobilité de cet ETM dans le sol, qui résulte de la solubilité de l’élément en question. Différents facteurs tels que le pH, la présence de 2 carbonates, l’ajout d’engrais azotés ou encore le pourcentage de matière organique influencent la solubilité d’un ETM dans le sol mais il est à noter qu’il s’agit souvent d’actions combinées de ces facteurs qui peuvent expliquer la contamination en ETM dans le sol. En ce qui concerne les cultures potagères, les ETM présents dans le sol peuvent alors être déplacés par la plante cultivée par son système vasculaire et entrer dans des parties comestibles. L’accumulation d’ETM diffère en fonction du type de légumes selon l’ordre croissant suivant : légumes-fruit, légumes-racines et légumes-feuilles mais aussi en fonction des caractéristiques propres à chaque espèce.
Le danger réside donc dans la consommation d’aliments cultivés dans un environnement contaminé. C’est pourquoi de nombreux pays ont adopté des normes de concentration maximale en ETM pour les sols et les cultures afin de garantir des niveaux de sécurité élevés pour leurs citoyens mais des dépassements de ces normes sont souvent décrits dans la littérature. Une des solutions proposées à cette exposition aux ETM est le lavage préalable des récoltes avant consommation.
En Europe, plusieurs études réalisées en milieu urbain présente des teneurs en Cd et en Pb dans les sols qui peuvent dépasser les normes légales européennes et qui sont majoritairement liés à des concentrations également en dépassement pour les fruits et les légumes. En RBC, le projet A.R.B.R.E.S. qui s’est focalisé sur la contamination en ETM des fruits a récemment mis en évidence des contaminations essentiellement en zinc et en plomb dans les sols, pouvant dépasser les normes légales européennes (respectivement 17,5 % et 7,4 % des échantillons) ; ainsi qu’une contamination en cadmium et en plomb des fruits lavés, également susceptible de dépasser les normes légales européennes (respectivement 4,8 % et 7,7 % des échantillons). Peu d’études sont néanmoins disponibles pour évaluer la situation générale des légumes cultivés en RBC alors qu’ils représentent un risque accru de contamination par rapport aux fruits.